𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟔

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Enora

DEUX SEMAINES PLUS TARD :
22H30 - THE HIVE, LOS ANGELES :

Finalement, j'ai pris la décision de continuer les services de nuit. Le salaire est beaucoup plus élevé que mon salaire habituel et les pourboires sont très généreux, même si j'en obtiens surtout parce qu'ils essaient de me séduire. Pensez ce que vous voulez, tant que vous me donnez votre argent. En travaillant de nuit, je pourrais me concentrer sur autre chose et garder mon esprit occupé. Ça va faire maintenant deux semaines que j'évite Owen, j'essaie de ne pas trop lui montrer mon inquiétude pour ne pas lui faire comprendre ce que j'ai compris. Et puis qu'est-ce que j'ai compris au juste ? Je me fais des films, Owen n'a rien d'un gangster, encore moins d'un meurtrier. Ce n'est qu'une coïncidence, j'en suis sûre.   

Depuis l'incident de la soirée, il est assez différent. Il vient toujours à la même heure le matin pour prendre sa commande habituelle. Il agit comme si rien ne s'était passé, mais je remarque qu'il est tendu. Peut-être pense-t-il que je ne suis pas au courant de l'événement ?

Quand il prend sa commande, aucun de nous deux ne lance la conversation. On se contente de se regarder avant qu'il n'aille s'installer au fond de la salle et fasse je ne sais quoi sur son ordinateur. Ces derniers jours, il est comme absent, toute cette histoire le rend bizarre. J'ai peur d'en parler avec lui, je ne sais pas à quel point Owen est impliqué dans tout ça. Je dramatise sûrement la situation, mais ma conscience m'empêche de me dire que ce n'est pas qu'un hasard.   

Être possiblement impliqué dans un meurtre, ce n'est pas rien. Je n'arrive pas à offrir ma confiance facilement et là, malgré tout ce qui s'est passé, je n'arrive pas à penser aux quelques chances qu'il ne soit pas ce à quoi je l'imagine.   

Il a fallu que ce suicide soit chez lui... Enfin, meurtre déguisé en suicide, cette histoire est vraiment un putain de mystère. Tout s'embrouille dans ma tête : le suicide, le meurtre, le tatouage d'Owen, le gang. Mais si ça se trouve, le tatouage était à la mode ? Mais le fait que la victime en ait un similaire me perturbe encore plus.   

"Je n'en sais rien, on m'a obligé à me le faire."   

Les mafias ont des signes spéciaux qui représentent leurs groupes. Le fait d'être tatoué est une question d'affiliation. C'est le fait de prouver à un groupe qu'on appartient au même groupe, une marque de fierté. Ça explique aussi sa réaction quand je l'ai découvert, son regard fuyant ou son brusque changement de sujet.   

- Enora.   

J'entends une voix derrière moi. Je sursaute et lève les yeux vers mon interlocuteur. Evelyne est debout devant moi, un plateau à la main.   

- Ça fait 10 minutes que tu nettoies cette table, déclare-t-elle.   

- Oh, désolée, j'étais perdue dans mes pensées.   

- J'avais remarqué.   

Elle me regarde en souriant et s'installe sur la chaise en face de moi avant de reprendre la parole.   

- À quoi tu penses ?   

- Tu n'as pas remarqué qu'Owen n'est pas comme d'habitude ? Lui demandé-je.  

- Quelqu'un s'est jeté par la fenêtre de son appartement, il est peut-être sous le choc.   

Elle marque une pause avant de continuer.   

- Peut-être qu'il la connaissait ? 

Je hoche la tête avant de me remettre au travail. Connaître la victime ? C'est sûr que si il la connaissait, ça expliquerait son attitude, mais ce n'est qu'une supposition. Je regarde les tables qu'il me reste à nettoyer, plus vite je termine de les nettoyer, plus vite je pourrai rentrer chez moi. Je soupire, épuisée par cette journée fatigante. Cette nuit, il y a eu énormément de monde, j'ai eu du mal à tout gérer. J'ai fait de mon mieux pour trouver l'énergie et le sourire pour les clients, mais je sens que mes forces m'abandonnent. Je regarde l'heure sur l'horloge en souriant, il est enfin minuit. Je pose le plateau avec les verres vides sur le comptoir et pars vers les vestiaires, ravie d'enfin pouvoir rentrer.   

J'attrape mon sac et sors mes vêtements.   

- Bordel, c'est une galère à retirer ce truc !   

Je tire toujours, mais rien ne bouge, l'uniforme est tellement serré que je n'arrive pas à bouger correctement. Je tente de tirer dessus et de le retirer en faisant attention à ne pas le déchirer. Après 5 longues minutes de bataille, je réussis enfin à retirer le haut. Heureuse d'avoir enfin réussi. Je le remets en place dans le casier et sors du vestiaire pour rentrer chez moi.
Ce travail est vraiment épuisant...

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Après avoir pris une douche, j'entre dans la cuisine et commence à chercher quelque chose à me mettre sous la dent. Il n'y a rien à grignoter dans les placards, alors je décide de me préparer quelque chose à manger. J'essaie de me concentrer sur ma tâche et tente de ne pas penser à Owen. Pendant que la nourriture cuit, je prends mon téléphone et vérifie si je n'ai pas reçu de messages.   

Aucune notification.   

Vivre seule est parfois compliqué. Tu n'as pas grand-monde à qui parler et tu t'ennuies assez souvent. Parfois je réfléchis à l'idée de trouver une colocataire, mais l'idée me passe rapidement en me rappelant qu'on vit dans un monde de psychopathes. Qui me dit qu'elle ne tentera pas de me tuer dans mon sommeil ? Je regarde une nouvelle fois mon téléphone et me dis que peut-être je pourrais envoyer un message à Owen pour lui demander comment il va ? J'hésite un peu, un peu beaucoup même. Pourtant, une voix à l'intérieur de moi me dit de lui envoyer ce message maintenant.   

Je m'inquiète énormément pour lui, j'aimerais beaucoup prendre de ses nouvelles, mais de toute façon je ne saurais pas comment commencer la conversation.
Allez Enora, t'es pas une froussarde.   

Je prends une assiette et me sers avant d'éteindre la lumière. Je pars m'installer sur le canapé, allume la télé et pose le téléphone sur la table en face de moi. Je regarde mon reflet à travers l'écran en me rongeant les ongles. Qu'est-ce que je suis censée lui dire ?
Je récupère le téléphone et commence à pianoter un message.   

Moi : Salut.   

C'est simple et pas compliqué, parfait.   

J'appuie sur le bouton envoyer et jette mon téléphone sur le canapé en expirant. J'angoisse vraiment pour pas grand-chose. Je soupire en balançant ma tête dans les coussins, il faut que je me change les idées et pour ça, rien de mieux qu'un bon vieil épisode de Naruto.

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18h07 - APPARTEMENT D'ENORA, LOS ANGELES :

Evelyne : Il y a eu une bagarre de fous au Hive cette nuit. Et devine qui faisait partie des cons qui se frapper dessus ?   

Evelyne vous a envoyé une vidéo.

ESMERALDA ⎜1 & 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant